À la rédaction des Cahiers pédagogiques, nous recevons souvent divers kits pédagogiques à destination des enseignants pour qu'ils expliquent à leurs élèves les bienfaits d'une consommation régulière de viande, ou bien de sucre, ou encore de lait. Ils sont proposés par des organismes qui jurent ne se préoccuper que de diététique, qui assurent disposer de garants scientifiques, mais qui sont tout de même financés par des associations professionnelles qui ont d'autres préoccupations en tête que la santé des élèves, sonnantes et trébuchantes. Quand GDF Suez met au point un jeu sur la filière énergétique à destination des élèves, on a tout de même du mal à croire que ce soit indépendamment de toute visée promotionnelle de la marque, qui apparaît d'ailleurs très clairement sur le site qui a été présenté lors de notre réunion. Était-il pertinent que les Cahiers pédagogiques se fassent le relai de telles opérations à l'occasion d'une réunion sur le jeu en classe ? J'ai été en en tout cas bien intéressé au final par la découverte de ce qu'ils proposent : un jeu manifestement très sophistiqué, très élaboré sur le plan graphique ou technique, certainement beaucoup moins du point de vue pédagogique. Le contraste avec ce que nous avaient présenté Marc Berthou et Dominique Natanson dans la première partie de la réunion était frappant : eux se débrouillaient avec quelques morceaux de papier découpés en guise de cartes à jouer, mais avec une approche pédagogique mûrement pensée du côté de la mobilisation intellectuelle des élèves. Dans le jeu de GDF Suez, j'ai eu le sentiment que l'élève devait certainement passer beaucoup plus de temps à essayer de comprendre le jeu et ses règles plutôt que de comprendre quoi que ce soit aux enjeux énergétiques d'aujourd'hui et de demain. C'était au final bien intéressant de comparer des deux approches, et je me suis dit que ce n'était clairement pas de la publicité pour l'approche marchande !

Rebonds 4

Je trouve intéressant d'aller au delà des préjugés de départ, de connaître l'offre, d'entendre leurs arguments et de juger sur pièces. Pour info les concepteurs de ce jeu sont les seuls professionnels présents à Ludovia (université d'été du numérique) à avoir acceptés d'être confrontés aux blogueurs (la plupart profs) pendant une heure, et ils se sont montrés convaincants alors qu'on ne les a pas ménagés. 

Après, garder l'esprit ouvert ne veut pas dire ne pas se méfier, et il me semble qu'explorer ces doutes légitimes peut se faire aussi avec les élèves : Qui a fait ce jeux ? Dans quel but ? Est-il neutre ? Comment pourrait-on le vérifier ?

Et là on fait d'une pierre deux coups : on profite de la plus-value pédagogique du jeu ET on aiguise l'esprit critique de nos élèves. En plus, comme l'équipe de ce jeu est intéressée par des retours on peut le faire aussi avec les élèves.

Bref, à ne pas écarter d'emblée de mon point de vue !

 

Si GDF-Suez, par altruisme, est pret  à financer des équipes d'enseignants pour qu'ils créent des jeux sur l'énergie en toute indépendance et sans que son logo apparaisse, pourquoi pas.Mais peut-on y croire ?Je pense qu'en effet la logique interne de construction de jeux est toute différente chez les enseignants. Il s'agit de dénouer des obstacles, de mettre en situation, de provoquer des débats dans les équipes, de modifier les représentations...On peut légitimement douter des qualités pédagogiques du capitalisme...

Pour ceux qui voudraient le tester, il est ici

Comme promis, je l'ai testé et fait tester par mon cœur de cible local, mon fils de 13 ans. 

Mon avis : un jeu lourd, à la prise en main pas intuitive du tout, avec beaucoup de consignes à découvrir (au sens littéral : j'ai du tâtonner un peu pour trouver ce qu'il fallait faire), beaucoup de paramètres à gérer en même temps. Mais en même temps peu de choses à faire, un scénario de jeu très fermé, sans réelle liberté de choix. Ça ne m'a pas intéressée longtemps, à vrai dire : je n'ai pas été plus loin que la première mission. Je ne pense pas le proposer à mes élèves, ou alors à titre de ressource à voir par curiosité.

Fiston a tâtonné aussi un peu pour la prise en main. Il a poursuivi plus loin que moi mais il s'est lassé lui aussi très vite quand, dans la deuxième mission, il n'a pas réussi à trouver l'icône permettant de relier ses centrales pour distribuer le courant. Le scénario de jeu très fermé et directif ne lui a pas plu. Son avis riche et nuancé : "bof, c'est pas très intéressant". 

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