Document du Samedi 19 Avril 2014 - 10:33
L'accompagnement des élèves : au cœur du métier d'enseignant ?
Changement de posture, nouvelles compétences

Pour faciliter les apprentissages des élèves, les enseignants sont conduits à proposer une diversité de dispositifs qui les conduit à occuper alternativement plusieurs fonctions : enseigner, animer, conseiller, accompagner, évaluer etc. Chacune de ces fonctions suppose des compétences spécifiques. Or, des travaux de chercheurs portant sur l’accompagnement de stagiaires par des tuteurs montrent que l’habitus enseignant parasite souvent la mise en place du positionnement nécessaire à cet accompagnement. Se référant à la catégorisation de Elias Porter, collaborateur de Carl Rogers,  Jean-Paul Dugal (Travail et formation en éducation n° 4 ,) montre que les tuteurs adoptent trois attitudes dominantes : les attitudes d’investigation, d’évaluation et de décision là où il serait au moins aussi utile de développer des attitudes de compréhension, soutien, interprétation. Plutôt que « donner des conseils » ou « décider pour l’autre », ne serait-il pas bénéfique de « tenir conseil », à deux ou à plusieurs à propos d’un objet de travail partagé ? Ces observations valent aussi pour les dispositifs d’accompagnement des élèves.
Pour accompagner, il est donc nécessaire d’effectuer des ruptures par rapport à  une vision dominante du métier centrée sur la transmission. Ces ruptures  nous semblent bien identifiées  par Anne Marie Bériot (dans le n° 31 de la revue de l’ex-INRP : Recherche et formation). Celle-ci souligne la nécessité de

  • Passer de la parole du professeur à l’écoute  de l’élève
  • Travailler collectivement et casser le cloisonnement disciplinaire
  • Porter un regard différent sur l’acte d’apprendre
  • Miser sur la dynamique créative de l’enseignant pour favoriser les apprentissages des élèves

Ces ruptures avec la situation transmissive supposent de développer ou renforcer des compétences. Pour Françoise Clerc (HSN n° 22 1des Cahiers pédagogiques) elles sont de trois ordres : les compétences d’analyse et de diagnostic, l’apprentissage de l’attitude d’écoute, l’appropriation d’outils conceptuels nécessaires à la maitrise des problématiques induites par l’accompagnement et par une réflexion sur l’engagement éducatif auprès des familles.

Toutefois ce n’est pas la somme des compétences développées individuellement par chaque enseignant qui fera la réussite du dispositif d’accompagnement, mais bien plutôt le passage à une culture de coopération qui favorise la régulation  collective de situations de travail très différenciées. La responsabilité individuelle de chaque enseignant est engagée, mais doit  pouvoir s’inscrire dans l’exercice collégial de la responsabilité d’une équipe.  Cet impératif suppose des temps et des lieux pour poser des diagnostics collectifs, pour inventer et ajuster des réponses, pour évaluer la pertinence des actions entreprises. C’est donc l’organisation du travail collectif qui est en jeu (concertations, emplois du temps, instances de décision, formation…)
 

  • Nicole Priou (Retraitée - Ex Professeur Collège/Lycée et Formatrice)
  • 1 http://librairie.cahiers-pedagogiques.com/238-aider-et-accompagner-les-élèves-dans-et-hors-l-école.html