Document du Samedi 1 Mars 2014 - 22:28
Le métier enseignant
Travailler en équipe ? quelle idée !

J’ai longtemps cru, même à l’époque où je le pratiquais intensément, que pour qu’une équipe existe, il fallait que ses membres se soient choisis, qu’ils soient volontaires et surtout qu’ils aient envie de faire « autre chose », quelque chose qu’on ne fait pas ordinairement, et surtout quelque chose qui irait contre le travail habituel, les habitudes et le système. Cette équipe là, si belle à vivre, si précieuse (et surtout si rare), doit continuer à exister, pour son pouvoir de stimulation, d’entrainement, d’innovation.
Mais je crois qu’il faut qu’il existe aussi un travail d’équipe quotidien, qui se fasse avec le collègue « ordinaire », celui que je n’ai pas nécessairement choisi, pour faire notre travail ordinaire. Autrement dit je crois qu’il faut changer notre façon de dire « je suis enseignant », et de pratiquer. Je pense que c’est à ce prix que nous surmonterons les innombrables problèmes qui se posent à l’école d’aujourd’hui. Beaucoup d’établissements prioritaires le savent très bien, où le collectif aide, soutient, permet, facilite le quotidien du travail. Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit : le travail enseignant ne peut être fait uniquement du travail collectif, il reste une grande part individuelle. Mais ce travail de chacun ne peut que profiter de l’existence, en même temps et en coordination, d’un collectif de travail.

On me dit : « mais les équipes, celles qui sont dans les textes, l’équipe pédagogique, ça ne marche pas, on le voit bien tous les jours ». Il y a des conditions à créer, et parmi ces conditions, une certaine conception de ce métier qu’il faut dépasser, parce qu’elle est... dépassée. Alors faut-il dire : non, chez nous ce n’est pas possible, formés comme ils sont, les profs français ne peuvent pas apprendre à travailler ensemble ? On baisse les bras et on laisse tomber ? Pourtant tout le monde a à gagner à changer cet état d’esprit : les enseignants, les chefs d’établissements, les élèves.

Une dernière remarque : il ne faut pas tout confondre : le conseil d’administration, la commission permanente, ne sont pas des « équipes » : ce sont des lieux institutionnels, où des pouvoirs sont en jeu de façon réglementaire et réglementée. Leur fonctionnement devrait souvent être plus démocratique qu’il ne l’est, et leurs règles de fonctionnement mériteraient d’être repensées, mais on ne peut citer le mauvais fonctionnement des CA comme argument pour dire que les équipes ne fonctionnent pas.

J’aimerais beaucoup que ce texte provoque des réactions vives et le débat que cette question mérite.

  • Françoise Colsaet (enseignante)