1) je vous soumets cette situation.

Un professeur a une heure de latin en 5e chaque semaine de 17hà18h. Vu
l'heure tardive, il apporte toute l'année de l'eau et des biscuits pour
un rapide goûter.

Un mardi de juin, il n'y a que 5 élèves, les autres étant à une
répétition théâtrale. Parmi les 5, certains viennent de commencer le
ramadan. Le professeur dit qu'on ne fera pas de goûter ce soir-là pour
ne pas mettre des gâteaux sous le nez des jeûneurs (mais ceux qui le
veulent peuvent boire).

Un père d'élève, représentant une fédération de parents, (ce qui
suppose que son enfant se soit plaint à lui) appelle le Principal du
collège deux jours plus tard pour se plaindre de cette grave entorse à
la laïcité ( ne pas proposer les habituels biscuits aux élèves parce
que d'autres font ramadan) , ajoutant : " Si ça continue, on ne va plus
non plus servir de repas à midi pendant le ramadan !".

Le principal a assez vite coupé court à la discussion.

Allez, à vos dissertations !

 

geneviève Frame

Rebonds 16

Emilie Pradel    Je crois que j'ai un problème avec les religions, au sens dogme.Parce que je n'ai aucun problème avec la spiritualité.

Selon moi chacun pratique sa spiritualité comme il l'entend. Il y a des symboles derrière un jeûne, je ne les connais pas (n'étant pratiquante d'aucune religion) mais j'imagine qu'il s'agit d'une sorte de dépassement de soi, de se reconnecter avec son être profond, ou comme l'a joliment dit Fadi sur Facebook, "prendre le temps des choses simples, aller vers soi, partager, se débarrasser de l'excessif, prendre confiance, avancer, aimer..."Donc si on est pratiquant et qu'on veut faire le ramadan, à priori on ne le fait pas juste parce qu'on est obligé, on le fait parce que qu'on pense que c'est bon pour nous, non ? Et du coup ce qui est bon pour moi ne l'est pas obligatoirement pour les autres. Donc personnellement si je décidais de jeûner je ne l'imposerais à personne d'autre que moi. Et si je demandais à mon enfant de le faire je donnerais du sens à cet acte et ne lui promettrais pas les feux de l'enfer si elle ne s'en sentirait pas capable. Je lui expliquerais que c'est un long travail intérieur et que le but est de se dépasser.Oui je sais, j'ai tendance au romantisme et à voir la réalité avec mes filtres....Avant de finir j'ai envie de tenter la métaphore de l'arrêt du tabac. Parce que c'est un grand travail intérieur aussi pour aller vers le mieux. Si je sens que c'est bon pour moi et que je décide d'arrêter, je ne vais pas demander à tout mon entourage de s'abstenir.

Je ne suis pas dans la réalité de notre société hein.... C'est pour ça que je n'aime pas les religions, au sens dogme. Et c'est pour ça aussi que j'ai du mal à avoir un avis tranché sur les problèmes que pose le ramadan.

Bon ramadan à ceux qui le font, bon arrêt du tabac à ceux qui le font, bon chemin pour aller vers soi à tous !

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Pour ma part, j'ai pour habitude d'offrir un goûter à toutes mes classes lors de la dernière heure de cours. Lorsque j'ai réalisé que cette heure tomberait pendant le ramadan, j'ai décidé d'avancer l'heure du goûter à une heure de cours de la semaine dernière. Il ne s'agit pas de ne pas tenter les élèves qui jeûnent, mais de permettre à tous de partager ce goûter.Entre temps, nous avons reçu un mail de la direction, interdisant les goûters, car il y a apparemment des profs qui ne font plus que des goûters pendant les quinze derniers jours, et le proviseur disait qu'il avait du mal à convaincre les parents de la nécessaire assiduité de leurs enfants, et aussi parce que certains laissaient les salles dans un état de porcherie.Je suis allé voir le proviseur pour chercher à négocier. Il m'a dit que même s’il savait que je limitais le goûter à une heure, et que je laissais toujours les salles propres après, il ne voulait pas faire d'exception.Comme j'avais déjà acheté de quoi faire cookies et gâteaux, je les ai préparés, et emballé 35+34+20+18=72 sachets individuels contenant chacun deux parts de gâteau et un cookie (pas très écolo, les emballages!), et je les ai distribués en fin de journée pour que les élèves les mangent en dehors du lycée.Les élèves étaient ravis.Et comme cette semaine, je leur ai donné une feuille d'évaluation sur l'année que nous avons passée ensemble, je leur ai dit que j'avais donné les goûters avant, afin d'influencer positivement leur évaluation!Voilà pour mon anecdote.Monica

P.S. Bon ramadan Sylvie, et les autres…

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Ah oui, j'ai oublié de dire que je n'aime pas quand un "cadeau" finit par être considéré comme un dû.La laicité  (de l'école) étant, à mes yeux, le cadre qui doit permettre à tous les enfants d'y venir et de s'y sentir tous autant "chez eux", je ne partage pas l'idée que la présence à l'école d'élèves faisant le ramadan soit un "grignotage" de la laicité. Au contraire.

Je comprends qu'on puisse s'interroger sur la dureté (et dans une certaine mesure le danger, et pas seulement pour les plus jeunes, surtout à mon sens en ce qui concerne le fait de ne pas boire pendant quelque chose comme 15h d'affilée en ce moment) de cette pratique pour des presque encore enfants, et se dire que seul le dialogue dans la société peut faire évoluer les choses...  je crains un peu qu'on n'en prenne pas trop le chemin... Mais on peut quelquefois aussi se demander si une société qui considère comme normal de tenir enfermés et assis 6 heures par jour les enfants dès 5 ans, sans compter les heures avant et après parce que les parents travaillent, et des parents qui en rajoutent en leur imposant le mercredi, le samedi etc., les entrainements et cours de tennis, judo, danse, piano, solfège, et les cours particuliers (là je parle du lycée que je connais), si tous ces gens ont vraiment des leçons à donner sur ces sujets.

Je ne vois pas bien non plus en quoi le fait de ne pas apporter des gateaux ce jour là soit une "grave entorse à la laicité", comme le dit le parent d'élève (la laicité prescrit-elle d'apporter des gateaux en cours de latin de 17 à 18 ? Dans ce cas, cette jurisprudence pourrait être élargie à tous ceux comme moi qui ont fait cours de 17 à 18, en 8 ème ou 9 ème heure de la journée pour certains élèves et quelquefois pour le prof, d'une matière éminemment difficile comme les mathématiques (c'est quand même plus dur que du latin ?- je blague, pour ceux qui n'auraient pas compris)... ça ferait beaucoup d'ennemis de la laicité. 

La vraie question, pour moi, posée par ce que rapporte Geneviève est celle de la façon de se comporter dans une société qui est diverse et qui n'a pas encore bien appris à le vivre : comment je fais si j'apporte à manger dans un groupe où il y a des gens qui jeunent ? Comment je fais si je jeune et que je suis présente à un moment où d'autres mangent ? Comment je fais quand j'assiste à un mariage ou des obsèques et que tout le monde se lève, s'assied, dit une prière ? Au-delà même du "comment je fais", il y a "comment je le ressens" ? J'entends, dans ce témoignage, que le prof de latin se sentait mal à l'aise d'apporter des gateaux à un groupe où certains n'en mangent pas. Il culpabilisait… ou il avait peur de ne pas savoir faire si un gamin faisait une remarque...

Je n'ai pas de réponse à la question, mais il me semble que Sylvie nous apporte un élément, que des élèves - et des collègues- m'avaient déjà formulé de la même façon : "non, ne changez rien ; ce n'est pas parce que moi je fais ramadan que cela doit empêcher les autres de manger ou faire qu'ils se sentent mal à l'aise de le faire".En l'espèce, si le "goûter" de Geneviève avait été un goûter exceptionnel ( pour "fêter" la fin d'année, par exemple), j'aurais pensé : il vaut mieux l'éviter, changer la date ou proposer une autre forme de fête ; mais à partir du moment où c'est une habitude, on ne la change pas ; on pense simplement à dire, le jour même aux petits qui jeunent : "ça ne vous embête pas, on fait comme d'habitude ? " par politesse.

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Les jours de Ramadan je ne changeais rien à mes habitudes de cours. En revanche je ne faisais pas de devoirs pour l’Aïd car ça fait partie des jours fériés officiels pour les musulmans. Quand la rupture du jeûne avait lieu avant la fin des cours, je ne disais rien quand un élève mangeait discrètement une datte mais je ne lui montrais pas que je l’ avais vu. Mais je n’acceptais pas qu’ un élève sorte ouvertement de quoi manger en plein milieu d’ un cours "parce que c'est l’heure". Hypocrite ? Non, laïque et compréhensive.Je rappelle que la loi sur la laïcité s’ applique avant tout aux personnels et ce qui me gêne ici c'est que c'est le prof qui propose un aménagement.Dominique Guy

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Je signe car « J'appartiens à une génération qui a connu le poids de l'église catholique** sur la société civile, je ne comprends pas qu'au nom de la diversité on trouve normal de "favoriser" ce que nous avons combattu. »Remarques :Constat d’un nouveau point Godwin : on ne peut plus éternuer sans se faire taxer d’islamophobe, d’antisémite (je ne trouve pas le mot pour le catholicisme), de raciste…ce qui est bien commode pour  discréditer l’opposant et bloquer toute réflexion.Vu ces jours-ci sur je  ne sais plus quel journal télévisé un reportage sur un trentenaire de deuxième génération, bordelais ? Terrassier de son état, qui parlait de son vécu de sa religion d’une manière remarquable  (je m’en veux d’avoir pensé une minute que c’était joué) : intimité, invisibilité, convivialité. On devrait faire voir la séquence dans les classes.Ce que les religions ont de plus remarquable c’est leur tendance à rechercher le pouvoir et à en abuser. Après les croisades, les dragonnades, les missionnaires  nous avons le mariage pour tous, la Pologne, Israël, Daech et ce n’est pas fini.Je porte une kippa à un enterrement juif, si Sylvie m’invite à un repas de ramadan ce sera avec plaisir…Je ne saurai si je suis laïque que quand j’aurai été enterré civilement.Jean Le Bras

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Voici une petite histoire pour prolonger le débat sur le goûter pendant le Ramadam dans notre belle école laïque et républicaine

Dans le dispositif Ulis de mon collège où je suis enseignante coordinatrice , O... est musulman et fait le ramadan. Il l'a signalé au moment de programmer un goûter organisé par la Ligue de Droits de l'Homme pour récompenser les élèves d'avoir participé au concours On ne naît pas citoyen ou citoyenne on le devient . Nous en avons tenu compte et avons fait la petite fête le 2 juin .

Le 6 juin, la professeure d'anglais d'O me demande si je peux accompagner une sortie avec sa classe d'inclusion la 5°1 : un déjeuner dans un restaurant américain du quartier le 16 juin . Coût : 12 euros par élèves. Je décline l'invitation en précisant que j'ai cours à ce moment- là et que de toute façon c'est aussi Ramadan pour O.....  - ce qu'elle ne savait pas.

La sortie a eu lieu hier. O.... m'a demandé s'il pouvait rester en dispositif Ulis.Le Ramadan a été en fait  une aubaine pour lui : celle de ne pas perdre la face devant ses camarades qui pouvaient s'offrir un repas américain  à 12 euros.

Bonne journée

Evelyne

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