Réflexion sur mes croyances, sur les croyances
Fiche pour les enseignants et les éducateurs
Les croyances ne sont pas un vernis superficiel chez les hommes. Elles sont souvent bien implantées, ont leur racine dans l’affectivité, l’enfance, la famille, l’éducation, le type de milieu, de société, de civilisation dans lesquels on vit. Elles forment le terreau de préjugés tenaces (racisme, sexisme, homophobie etc.). Nous avons des raisons solides d’y tenir, souvent peu rationnelles, car elles nous donnent des « explications » du monde, et des repères pour s’y orienter et agir.
Elles entretiennent un rapport étroit à une vérité absolue, donnent un sentiment de certitude non interrogé : dogmatique (c’est évident, cela ne se discute pas), anhistorique (çà a toujours été comme çà et çà le sera toujours). Cette culture d’une réponse à une question que l’on ne s’est même pas posée peut être dangereuse pour la vie de l’esprit et le vivre ensemble, car elle nie la légitimité de la pluralité des opinions, donc la démocratie, l’intérêt de la recherche, de la discussion, de la confrontation, et en définitive la reconnaissance de l’altérité. Elle est un déni de l’esprit critique, de la vertu du questionnement et de la problématisation pour élaborer sa pensée, la faire évoluer, l’approfondir. Et d’autant plus dangereuse que si persuadé de détenir la vérité, je veux l’imposer aux autres, y compris par la violence, avec la bonne conscience que c’est « pour leur bien », excluant voire éliminant physiquement ainsi la divergence, la dissidence, l’hétérodoxie.
Pour résister à la pente totalitaire du dogmatisme, qui va aujourd’hui jusqu’au fanatisme et au terrorisme, il faut développer dans la société, et particulièrement à l’école, surtout à l’adolescence où se forgent certaines convictions fortes, une culture de la question, de la discussion, de l’argumentation, de la raison. Cette culture n’appelle nullement à renoncer à ses croyances, mais à chercher à mieux les fonder, voire à les interroger, à admettre d’autres croyances que les siennes, à apprendre à les connaître, les comprendre et en discuter.
D’où le plan de discussion ci-dessous proposé à des adolescents :
A) Croire, c’est quoi, pour comprendre ce qu’est une croyance, et savoir ce dont on parle ?
B) Quels sont les différents types de croyance que nous avons, car elles sont de nature très différente ?
C) Y a-t-il des degrés d’adhésion dans nos croyances, question essentielle pour entreprendre leur dédogmatisation ?
D) Pourquoi on croit ce qu’on croit, ce qui amène à identifier l’origine de nos croyances ?
E) Le vrai et le faux, comment savoir, ce qui pose la question de la fiabilité de nos croyances et connaissances ?
F) Quelle différence entre un fait, qui renvoie à la résistance de la réalité, et une opinion, qui interprète les faits ?
G) Quelle est la différence entre la science et la religion, pour distinguer des ordres de croyance, relevant de la raison ou de la foi ?
H) Quelle différence entre le réel, l’imaginaire, le virtuel, que les adolescents ont parfois tendance à confondre ?
I) Du bon et mauvais usage d’internet et des réseaux sociaux, question cruciale pour les drogués à facebook.
J) Comment interpréter un texte, problème posé par tous les ingrismes, notamment religieux…
Fiche à usage des adolescents
A) Croire, c’est quoi ? Qu’est-ce qu’une croyance ?
Peux-tu donner des exemples de croyance ? Des cas où on dit : je crois que ; je crois en…
Donne des exemples dans le domaine de la vie de tous les jours, des exemples s’appliquant au domaine affectif (amitié, amour), familial, scolaire etc. Dans les domaines politique, religieux, scientifique…
S’agit-il de croyance, quand je dis : je crois en ton amitié ; je crois que je suis né du ventre de ma mère ; je crois que la démocratie est meilleure que la dictature ; je crois que le ciel va me tomber sur la tête (les Gaulois pensaient cela) ; je crois que l’eau est composée d’oxygène et d’hydrogène ; je crois que j’irai plus tard au paradis ?
B) Différents types de croyance
Quelle différence tu fais entre dire (réponse possible entre parenthèses) :
- Je crois que Napoléon a été empereur des français (c’est un fait)
- Je crois qu’il fera beau demain (mais on n’y est pas encore, c’est une prévision)
- Je crois que Claude (ou Valérie) m’aime (expression d’un jugement sur un sentiment)
- Je crois que nous avons un bon (mauvais) président de la République (c’est une opinion politique)
- Je crois que Dieu existe (n’existe pas) (c’est une croyance religieuse ou athée)
- Je crois que 2+2 = 4 (c’est un calcul mathématique exact)
- Je crois que la terre tourne autour du soleil (contrairement à ce que montrent nos sens, c’est ce que permet de vérifier une théorie physique)
Y a-t-il des points communs entre tous ces exemples ? Et des différences ?
C) Est-ce qu’il y a des degrés dans les croyances ?
Les fantômes, tu crois qu’ils existent ? Et les extraterrestres ? Pour toi, les miracles, ils ont eu lieu ou non ? Y a-t-il quelque chose ou pas après la mort ? Ton âme est-elle immortelle ? Qu’est-ce qui t’amène à croire ou à douter de ces choses ?
Est-ce qu’il y a des choses auxquelles tu crois un peu, beaucoup, passionnément, ou pas du tout ? Donne des exemples où tu y crois avec certitude (c’est pour toi absolument vrai) ; où tu as tendance à croire (c’est plutôt vrai, probable) ; moyennement (c’est possible, peut-être, mais je n’en suis pas sur) ; très peu (ce n’est pas évident, et même un peu douteux) ; pas du tout (ça ne tient pas la route, c’est absurde)
Entre le doute radical (je ne sais pas du tout) et la certitude absolue (c’est vrai sans aucun doute possible), vois-tu des nuances ?
Qui est le plus certain de trois amis ? Celui qui dit : « Demain, c’est possible qu’il fasse beau (mais il pourrait faire mauvais) – Ou : « Demain, c’est probable qu’il fasse beau (il y a une grande chance) – ou « Demain, il fera beau, c’est sur !) ?
Le possible, c’est plus ou moins certain que le probable ? Pourquoi ?
Le probable c’est ce qui est tout à fait sur, ou ce qui a beaucoup de chance d’être vrai ? Pourquoi ?
D) Au fond : Pourquoi on croit ce qu’on croit ?
D’où viennent nos croyances ? Quelle est leur origine ?
De notre famille ? De nos copains ? De l’école ? De la télévision ? Qu’est-ce qui est le plus sur ?
Est-ce que tu crois quelque chose parce qu’on te l’a dit ?
Mais dois-tu croire tout ce que l’on te dit ?
Est-ce qu’il peut arriver que tes parents se trompent ? Tu as des exemples ?
Est-ce qu’il est déjà arrivé qu’ils te mentent ? Tu as des exemples ?
Comment savoir, si quand ils te disent qu’une chose est vraie, ils ne se trompent pas eux-mêmes, ou ne te mentent pas ?
Quand on te transmet une croyance comme une vérité, qu’est-ce qu’il serait prudent de faire pour savoir si c’est bien une vérité ?
E) Le vrai et le faux, comment savoir ?
Comment tu peux savoir qu’une chose est vraie ou fausse ?
Ce qui est certain pour moi est-il pour autant vrai ?
Tu as des exemples où tu t’es trompé en croyant que tu étais dans la vérité ? Comment faire pour ne pas te tromper, pour ne plus te tromper ?
Qu’est-ce que douter ? Tu as des exemples dans ta vie où tu as douté de quelque chose ? Est-ce que cela t’a fais ou non changer d’avis ? Pourquoi ?
Est-ce qu’on peut croire qu’on aimait quelqu’un et s’apercevoir qu’on ne l’aime plus ? Croire que quelqu’un nous aime et s’apercevoir que ce n’est pas le cas ?
Être capable de changer d’avis, c’est un signe de force ou un signe de faiblesse ? Un signe d’intelligence et de lucidité, ou de lâcheté ?
Que penses-tu de quelqu’un de droite qui passe à gauche (ou inversement) ? De quelqu’un qui de croyant devient athée (ou inversement) ?
Que penses-tu de quelqu’un qui ne change jamais d’avis ? Même si on lui démontre qu’il se trompe ?
Donne des exemples où tu as déjà changé d’avis. Pourquoi tu as changé d’avis dans ces cas ?
Est-ce que tu as eu raison ou tort ? Pourquoi ?
Que penses-tu de la personne qui dit : « C’est vrai parce que je le dis ».
Suffit-il que je le dise ou qu’on me le dise pour que cela soit vrai ?
Que signifie cette phrase : « Tu le crois, ou tu en es sur ? ».
Pour que cela soit vrai, qu’est-ce qu’il faut ?
Que penses-tu de ces hypothèses : il faut qu’on me le montre ; il faut qu’on me le démontre par la raison, qu’on me le prouve, que ce soit vérifié ?
Est-ce que je peux dire en même temps d’une même chose : c’est blanc et c’est noir ? Qu’est-ce que tu en conclus sur l’exigence d’une pensée ?
F) Un fait et une opinion
Quelle différence tu fais entre dire :
- « La tour Eiffel est à Paris » (c’est un fait) et j’aime/je n’aime pas ce monument (c’est une opinion) ?
Quelle différence tu fais entre un fait et une opinion ? 
On peut avoir des opinions différentes sur un même fait ? Donne des exemples.
Pourquoi certaines personnes nient certains faits ? Ex : les chambres à gaz n’ont pas existé dans les camps nazis ; les hommes ne sont pas allés sur la lune ; le 11 septembre, les tours jumelles n’ont pas été détruites etc.
Qu’est-ce que la théorie du complot ? Pourquoi existe-t-elle à ton avis ?
Pourquoi un manuel palestinien et un manuel israélien ne racontent pas l’histoire de leur pays de la même façon ?
G) La science et la religion
- Quelle différence tu fais entre « Je crois en Dieu » et « Je sais que 2+3 = 5 ». Entre la religion et la science ?  Entre croire et savoir ?
- Qu’est-ce que la religion pour toi ? Et-ce important ou non ? Pourquoi ?
- Comment tu définis la religion ?
- Peux-tu citer plusieurs religions ? Y en a-t-il une plus vraie que les autres ? Si oui ou si non, pourquoi ?
- Peux-tu citer plusieurs sciences ?
Comment tu définis la science ? Qu’est-ce qu’une vérité scientifique ? Comment on l’établit ?
La science est-elle importante pour les hommes ? Pour les progrès de l’humanité ?
- D’après toi, la religion et la science sont¬-elles contradictoires ? Ou seulement différentes ? Pourquoi ?
Il y a plusieurs réponses à cette question : laquelle te semble la plus fondée, et pourquoi ?
- Elles sont contradictoires par leurs explications : pour la Bible, au sens littéral, le monde a été créé en sept jours ; la science propose la théorie du Big-bang (hypothèse de la naissance de l’univers, qui s’est produite en un seul instant, et il y a 4 milliards d’années).
- Elles ne sont pas du même ordre, et donc non contradictoires : la science fait une hypothèse basée sur la raison ; la foi utilise des histoires, des mythes, pour nous faire comprendre des choses difficiles.
H) Le réel, l’imaginaire, le virtuel
Qu’est-ce pour toi le réel, la réalité ? Donne des exemples de choses qui pour toi sont réelles, et des exemples de choses qui ne le sont pas.
Dans cette liste, qu’est-ce qui est réel, qu’est-ce qui ne l’est pas ? Mes professeurs à l’école,  un mirage, le monde d’un jeu vidéo, cette table, la guerre des étoiles au cinéma, mon avatar sur facebook, le réveil qui sonne le matin pour me lever, un roman…
Cette chaise que tu vois, elle est réelle ? Et la même que tu vois en rêve ? Qu’est-ce que tu en conclus ? Quelle est la différence entre la chaise « en vrai » et la chaise en rêve ? La réalité et le rêve ?
Quelle différence entre la fille (le garçon) parfait que j’imagine, et ceux que je rencontre tous les jours ? Entre les histoires que je me raconte et ma vie ordinaire ? La réalité et l’imaginaire ?  Est-ce que l’imagination transforme la réalité ? Pourquoi avons-nous besoin d’imaginer ? L’imagination, c’est une bonne ou une mauvaise chose ?
Quelle différence entre faire une partie de ballon avec mes copains/copines et un match de ping-pong sur un jeu vidéo ? Quelle différence entre le réel et le virtuel ? Pourquoi j’aime les jeux vidéos ? Est-ce que cela peut être dangereux de passer trop de temps dans des mondes virtuels ? Et de confondre parfois le virtuel et le réel ? Quelle différence entre tuer quelqu’un dans un jeu vidéo et dans la réalité ?
Quelle différence tu fais entre la réalité et la vérité ?
Que penses-tu de cette phrase : « La vérité, c’est l’accord entre la pensée et le réel »
I) Internet, les réseaux sociaux (Facebook etc.)
- C’est important pour moi internet ?
Tout ce que je trouve sur internet, c’est vrai ? Dois-je y croire ?
Comment savoir si un site me dit la vérité ?
Est-ce qu’il suffit qu’il affirme très fort certaines choses ? Qu’il mette des vidéos à l’appui de ce qu’il dit ? Qu’il montre ou cite des gens connus ou importants ? Qu’en penses-tu ?
- C’est important pour moi les réseaux sociaux ?
Facebook, quels sont ses avantages ? Y a-t-il parfois des inconvénients ? Lesquels ? Cite des exemples où cela a nui à quelqu’un. Où ça m’a nui personnellement ou peut me nuire. Quelles précautions dois -je prendre pour que cela ne se retourne pas contre moi ?
Qui accepter ou pas comme « ami » sur facebook ? A qui répondre ou pas ? Que mettre et ne pas mettre comme message, photo, vidéo etc.
J) Interpréter un texte
Il y a aujourd’hui beaucoup de débat sur l’interprétation de l’Ancien Testament pour les juifs, la Bible pour les chrétiens ou le Coran pour les musulmans : comment interpréter ces textes ?
Il y a plusieurs points de vue en présence :
1) Ils sont dictés par Dieu, et donc la seule interprétation possible, c’est ce qu’ils disent à la lettre, qui est la parole de Dieu. La vérité du texte, c’est son sens littéral, ça ne se discute pas.
2) Ils sont inspirés par Dieu, mais écrits par des hommes. Il faut donc les comprendre en fonction de l’époque où ils ont été écrits par ces hommes, et interpréter leur sens pour notre époque, ce qui demande une discussion.
3) Ce sont des histoires écrites par des hommes, de la même façon que les mythes grecs (Le voyage d’Ulysse, les travaux d’Hercule etc.), qui nous dévoilent sous forme d’histoires, de façon symbolique, des aspects importants de notre condition humaine.
Que penses-tu de ces trois interprétations ? Explique ta préférence…
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Soit cette petite histoire : « Un adolescent africain, Yacouba, va passer un rite d’initiation pour devenir adulte : dans sa tribu de guerriers, il lui faut tuer un lion, ennemi du groupe, car il mange les buffles du troupeau. Il part, déterminé à tuer, mais tombe sur un lion blessé très affaibli. Après une nuit de réflexion, il décide de ne pas le tuer et rentre dans sa tribu. Celle-ci est très fâchée de le voir revenir sans un lion mort. Il deviendra berger, au plus bas de la hiérarchie, à l’écart du village. Mais depuis, les lions n’attaquèrent plus le troupeau ».
A ton avis, que veut nous dire cette histoire ? Comment l’interpréter ?
Par exemple, que réponds-tu à cette question, et justifie ton point de vue : Yacouba est-il ou non un vrai guerrier ?
On peut dire : ce n’est pas un guerrier, il n’a pas tué de lion comme on le lui demandait. Ou au contraire : c’est un guerrier, car un vrai guerrier doit tuer un lion dangereux, et non blessé.
Alors, vrai guerrier ou pas ?
2) Yacouba est-il lâche ou courageux ? Que réponds-tu ? Justifie ton point de vue
On peut dire qu’il est lâche : il aurait dû alors aller chercher un autre lion non blessé et dangereux, pour montrer son courage et sa fierté d’appartenir à une tribu de guerriers. Ou au contraire : il a le courage d’affronter le jugement négatif de sa tribu ; il n’aurait pas été fier de tuer un lion blessé, même si personne ne l’avait su ; il a compris en réfléchissant que tuer n’est pas une solution, que la violence entraîne la violence ; et les lions ont compris que la non violence résout la question du cercle vicieux de la violence, puisqu’ils n’attaquent plus désormais la tribu…
Alors, lâche ou courageux, Yacouba ?
Qu’est-ce que tu en conclus sur la façon d’interpréter un texte, une histoire ?
Qu’est-ce qui peut faire qu’une interprétation serait plus vraie qu’une autre ?
Peut-il y avoir plusieurs interprétations acceptables ? A quelles conditions ?

Rebonds 3

A quoi ça sert de discuter ?       - Des exemples de discussion en classe (Conseil coopératif, DVDP...).- Qu'est-ce qu'une discussion ? Un échange verbal entre des personnes sur des idées. Qu'est-ce qu'on y fait : on s'exprime, on dit ce qu'on pense.- Quel est le contraire d'une discussion : bagarre, injures- A quoi ça sert ? 1) A échanger des idées, des opinions, à réagir à celle des autres. 2) A décider, négocier, régler calmement un conflit.- Discuter, ça évite quoi ? Ça permet quoi ? C'est utile ?1) Non ! Quand on n'est pas d'accord, ça peut entraîner des bagarres. La discute, c'est la dispute. C'est un truc de filles, nous, quand on n'est pas d'accord, on frappe.           C'est encore une discussion ? La discussion implique la suspension de la violence physique : les coups, c'est pas de la discussion ;  ou verbale : injurier, c'est donner des coups avec des mots. S'injurier, ce n'est plus discuter.Oui ! La discussion, ça peut calmer une bagarre, ça peut éviter la guerre. Discuter, ça arrête les coups. Discuter, c'est pas se disputer ? Quelle différence ?2) Non ! J'ai déjà mes idées, pourquoi donc discuter ?Est-ce que tu es sur d'avoir toujours raison ? Est-ce que parfois tu te trompes ? Tu as déjà changé d'avis ? Est-ce que les idées des autres peuvent être intéressantes ?3) Oui ! Ça rend plus intelligent de réfléchir, les autres m'aident, me donnent des idées. Qu'est-ce que l'on peut y trouver ? Avoir raison, trouver des idées, d'autres points de vue, chercher ensemble. Régler des problèmes.- Comment doit être la discussion pour que ça ne dégénère pas en cas de désaccord : Comment éviter de s'énerver quand on discute ? On doit s'écouter, ne pas se moquer, respecter l'autre. On doit être calme.- C'est important que tout le monde parle ? Comment on fait ? Lever la main, donner la parole à celui qui la demande, donner la parole à ceux qui ont le moins parlé, tendre la perche aux muets, demander de lire ce que l'on a écrit.- Comment ça peut fonctionner : que tout le monde ne parle pas en même temps : un tour de parole, lever la main. Il faut un président de séance qui donne la parole selon des règles. Et quand on n'est pas d'accord ? On fait des objections, on vote.- Une discussion quand ça s'arrête ? Quand on s'énerve, quand on va se disputer. Mais aussi quand on est d'accord, et qu'il n'y a plus rien à discuter. Quand on a voté, fini l'ordre du jour de la réunion.- Pourquoi des fois on n'intervient pas dans une discussion ? J'ai peur de dire des bêtises, que l'on se moque de moi, de ne pas savoir quoi dire, d'avoir tort, de ne pas savoir répondre, d'avoir l'air intello, bouffon...

Le point de vue des élèves.

Vous êtes nombreux, lorsque vous mobilisez le débat en ICM à défendre ce choix par l’argument selon lequel le débat est l’occasion pour les élèves d’exprimer leur point de vue et que cette expression est importante. Dans cette fiche je reviens sur quelques idées pour clarifier un peu les termes de ce sujet.Il faut argumenter d’avantage et il faut faire attention à ce dont il s’agit.A/ Argumenter d’avantageL’expression des points de vue des élèves à travers le débat est trois fois nécessaire :1. Il s’agit d’exercer (au double sens d’utiliser et de s’entraîner) la liberté d’expression. Celle-ci est un droit de l’homme, une valeur essentielle de la République (cf préambule de la Constitution de 1958) et un des fondements de la démocratie.2. Il s’agit d’exercer (là aussi au double sens d’utiliser et de s’entraîner) la tolérance : capacité à entendre des opinions que l’on ne partage pas.3. Il s’agit aussi d’exercer et d’apprendre les conditions de l’exercice de la liberté d’expression et ce que l’on nomme ses « limites » : la diffamation, le prosélytisme sectaire, l’appel à la haine, à la violence, à la discrimination (raciale, xénophobe, sexiste, homophobe…).Tout cela repose sur le postulat que la démocratie et les valeurs cela s’apprend non seulement par l’affirmation des valeurs par les adultes, mais aussi par l’exercice au quotidien de ces valeurs et leur examen.B/ Faire attention à ce dont il s’agitQu’il s’agisse de la classe ou de tout autre lieu d’expression, le point de vue et l’opinion sont des modalités d’expression qui correspondent à certains types de situation et d’énoncés.Il convient de bien différencier :- Le point de vue et l’opinion. Le point de vue est, au sens strict, « l’endroit d’où l’on regarde ».  Autrement dit, le point de vue  c’est la position que j’occupe dans la société, dans le groupe (dans la classe…) et qui motive le jugement que je porte sur l’objet du débat. Mon point de vue peut par exemple être celui d’un prof d’histoire, d’un citoyen français, d’un adulte, d’un militant laïc, d’un militant syndical ou politique, d’un passionné d’art contemporain… et je parle « du point de vue de… ». Le fait de rendre explicite le point de vue est une des conditions de la prise de distance que j’exerce avec ma propre opinion et du fait que je peux accepter d’entendre une opinion inverse de la mienne (lorsque je m’exprime « en tant que citoyen français » je m’engage à accepter que quelqu’un qui s’exprime « ‘en tant que citoyen anglais » puisse avoir sur la République une opinion différente de la mienne parce qu’il a un point de vue différent). L’opinion diffère du point de vue au sens où elle énonce un jugement. Issue de mon point de vue, mon opinion est l’expression du jugement (positif ou négatif par exemple) que je porte sur une idée, une proposition, un projet, une situation qui est soumise au débat.- les opinions et les perceptions. Ainsi au moment où j’écris ces lignes, je me tourne vers la fenêtre et j’observe le ciel : est-il bleu ou gris ? La distinction des nuances de couleurs est en partie subjective (une personne élevée dans une région méditerranéenne considèrera que le ciel que je vois aujourd’hui est gris, une personne élevée dans le nord ou l’ouest y verra plus facilement du bleu…). Ce qui est en jeu ici relève de la différence des perceptions qui dans ce cas dépend du point de vue (le lieu d’où je regarde et d’où je parle) mais pas de l’opinion parce que la couleur que j’attribue au ciel n’est pas en soi un jugement. Le jugement vient ensuite si j’affirme qu’un ciel bleu c’est plus beau, plus agréable qu’un ciel gris (ou à l’inverse que le ciel gris, avec toutes ses nuances, me plait davantage que le ciel bleu dans son uniformité assommante…).- Le fait de l’opinion. Ainsi le fait qu’une banane contient davantage de protéines qu’une pomme est un fait : cela ne se discute pas. On doit le constater, on peut se poser la question : lequel de ces deux fruits contient le plus de protéine ? on peut mettre en place un protocole scientifique pour résoudre le problème et aboutir à une réponse, on peut, souvent même, accepter la réponse qui a été apportée avant nous par des scientifiques qui ont fait la démonstration. Affirmer que la pomme contient davantage de protéine que la banane n’est pas exprimer une opinion, c’est faire erreur. Il n’y a pas lieu d’organiser un débat d’opinion sur le sujet. A l’inverse, on peut comparer le goût de la banane et de la pomme et exprimer des opinions divergentes sur cette question. Distinguer les faits des opinions est d’ailleurs un apprentissage essentiel qui peut passer par le débat : en cours de débat on apprend aux élèves à dire : « ce que je viens d’énoncer et un fait » ou « ce que Claire ou Paul vient d’énoncer est une opinion, pas un fait ». Déterminer la validité d’un fait est un objet d’apprentissage de tous les jours en sciences, en histoire, en géographie. Cela n’est pas toujours simple dans la mesure où la validité de certains faits n’est pas toujours démontrable. C’est le cas lorsque la science n’en est pas là ou qu’un débat scientifique remet en cause ce qui était jusqu’alors considéré comme un fait (la terre est plate…) ou plus simplement lorsque que le niveau de compétence dans le domaine de celui qui cherche à comprendre est insuffisant –on lui dit alors « c’est compliqué, tu comprendras plus tard » ce qui n’est pas vraiment satisfaisant).- Les hypothèses et les opinions. Lorsqu’avant d’avoir la réponse scientifique à cette question j’affirme que « je pense que c’est la banane » et quelqu’un d’autre affirme « à mon avis, c’est la pomme » nous n’exprimons pas nos opinions sur le sujet mais nous posons des hypothèses. Apprendre à différencier une hypothèse d’une opinion est un objectif d’apprentissage dans le débat ET dans la démarche d’investigation en sciences notamment. Ainsi lorsque je lance une démarche d’investigation scientifique, il est souvent utile de recueillir les hypothèses spontanée des élèves et parfois même les raisonnements sur lesquels reposent ces hypothèses. Mais ce sont des hypothèses et non des opinions. Cela permet d’élaborer le protocole de recherche de la bonne réponse.- Ce qui fait débat et ce qui ne fait pas débat. De ce qui précède découle qu’il faut différencier les questions qui « font débat » de celle qui « ne font pas débat ». On peut poser comme un postulat que les faits ne font pas débat. On peut affirmer que les hypothèses ne font pas débat : elles s’expriment puis on les vérifie pour en faire des faits ou pour les abandonner parce qu’erronées. Les opinions font débat.Dans le débat d’opinions donc il s’agit d’exprimer des opinions et de rendre explicites les prémices de ces opinions. Les prémices sont :- le point de vue de celui qui énonce le jugement (généralement le point de vue est un produit social – la famille, le quartier, la bande, un groupe d’appartenance religieux, national, régional, socio-économique…).- les valeurs qui sous-tendent le jugement (ainsi à propos du goût, celui-ci peut reposer par exemple sur la valeur « plaisir » –le sucré, le doux, l’acidulé…- ou sur la valeur « santé » - le maigre, l’énergisant, l’équilibré).- Les faits sur lesquels l’opinion s’appuie : leur nombre et leur validité (est-ce vrai ?), sont des éléments qui confortent l’opinion mais une opinion peut demeurer même lorsque la démonstration de l’absence de faits valides pour l’appuyer a été faite (ainsi il arrive que le racisme ou la xénophobie résistent à la démonstration de l’absence de faits valides pour les étayer).

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