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En refus d'interdisciplinarté à Clisthène

 

Cet élève est arrivé à Clisthène en cours de 3ème, plus précisément à la fin du premier trimestre. La motivation de sa venue était liée à une perte d’appétence pour l’école voire de sens. Ses parents s’étaient interrogés en 4ème sur l’opportunité de l’inscrire dans la structure mais face à son insistance à rester avec ses amis ils avaient renoncé. Après avoir obtenu de bons résultats en 6ème et en 5ème, la 4ème s’était révélée pour lui compliquée et le début de 3ème inquiétant coloré d’un soupçon de décrochage et d’une peur liée à l’orientation !

Son arrivée s’est faite en douceur, bien accepté par la classe, il s’est vite intégré. Ses résultats se sont rapidement améliorés et il a progressivement retrouvé confiance. Cependant nous avons noté que dès les premiers projets interdisciplinaires, son investissement se révélait moindre notamment lors d’un projet sciences expérimentales /français sur les enjeux de la génétique, la production étant une BD. Avantagé par la connaissance de notions étudiées en génétique dans son précédent collège, s’investir dans une travail convoquant le français, le dessin et les sciences lui semblait superflu. Cette tendance s’est confirmée dans les projets suivants, prenant une coloration plus négative lors des semaines interdisciplinaires. L’ensemble de ses résultats restant stables par ailleurs, nous lui avons fait remarqué cette différence mais sans nous alarmer véritablement et dans l’esprit de valoriser les réussites. Lorsque la dernière semaine interdisciplinaire a débuté , il a manifesté tout à la fois un refus de travailler en groupe avec des plus jeunes sur le thème proposé. Face à mes demandes d’explication et de changement d’attitude, il a clairement exprimé le fait que ces semaines représentaient pour lui une perte de temps, d’autant que la thématique : l’amour, ne pourrait pas lui servir dans la suite de ses études…

La discussion a été longue et passablement âpre et a été suivie d’une mise au travail mais mon sentiment était qu’il était satisfait d’avoir pu manifester son désaccord concernant l’interdisciplinarité. Par ailleurs, il savait l’importance que l’équipe accorde aux projets et aux SID , et ainsi il s’affirmait comme une personne n’adhérant pas à la pédagogie proposée. A partir de là, on peut s’interroger sur le sens qu’il a donné à son court passage à Clisthène et ce que révèle son refus de l’interdisciplinarité !

Il y avait chez cet élève une peur réelle de la sélection, des habitudes bien installées liées à l’évaluation : un travail non noté, évalué en compétences, ce qui est le cas des projets à Clisthène, n’a pas eu de poids, ni d’intérêt à ses yeux. L’interdisciplinarité ne pouvait pas répondre à son besoin de résultats immédiats car la menace d’une orientation non choisie ne lui permettait pas de faire le pari du long terme, de la lente constructions des liens qui se tissent entre les disciplines .

 

Nadine Coussy Clavaud, professeur à Clisthène