Enseignant d’Histoire-Géographie et Education civique, je participe au projet d’évaluation par compétences mis en place à la rentrée 2014 au collège Lou Vignarès (Vedène, 84).
Ce projet concerne deux classes de sixième ; j’interviens auprès de l’une de ces classes.
J’ai pris la décision de participer à ce projet pour me nourrir d’un vécu pédagogique me permettant de prendre position dans ce débat de fond sur l’évaluation des élèves.
En cette période de début décembre, mon positionnement, encore loin d’être clairement établi, peut néanmoins s’appuyer sur différents constats.
Ces observations sont facilitées par le fait qu’en parallèle de la classe évaluée par compétence, je suis également professeur d’une classe de sixième évaluée avec des notes.
Tout d’abord, le contenu de mon enseignement s’est enrichi par le fait que ce projet a permis de dégager des moyens renforçant la collaboration avec ma collègue d’Histoire-Géographie intervenant auprès de la seconde classe évaluée par compétences.
Nous sommes ainsi passés d’une collaboration informelle et épisodique à des échanges réguliers et à une mutualisation de nos expériences et de nos supports pédagogiques.
Ces moyens, même à un niveau moindre, peuvent-ils être pérennes ?
Dans notre réflexion disciplinaire, nous avons convenu comme une évidence que notre enseignement serait  identique pour les deux types de classes de 6ème , la différence intervenant seulement  au moment de l’évaluation.
J’ai décidé pourtant, dès la deuxième évaluation de l’année, de faire apparaître pour la classe de 6ème « classique » une double évaluation notes et compétences.
J’ai pris cette décision en constatant lors de la correction de la première évaluation que le prisme des compétences permettait  aux élèves de mieux cerner leurs axes de progression et au professeur  de clarifier sa remédiation.  Ainsi, plusieurs élèves ont pu, oralement, m’expliquer les raisons d’une compétence non validée ou partiellement acquise.  Pour les élèves de la classe « avec notes »,  l’identification des attendus s’est révélée plus complexe pour les élèves et mon guidage plus aléatoire sans le repère des compétences.
Même si cette autoévaluation est loin d’avoir abouti à 100%, l’approche par compétences constitue une clarification pour que l’élève identifie les exigences attendues dans son apprentissage disciplinaire et transdisciplinaire.
En effet, dans une matière regroupant trois disciplines différentes, l’approche par compétences est un outil précieux pour mettre en avant des passerelles disciplinaires  et des objectifs communs. Il en est ainsi de la compétence « Décrire » définie dans les programmes d’Histoire et de Géographie. Cette compétence nécessite de savoir  nommer et identifier les composantes de l’objet de la description en  utilisant un vocabulaire approprié.
Lors de la remédiation d’une évaluation de Géographie où les élèves étaient amenés à décrire l’environnement proche de leur collège, le parallèle a pu être fait avec une précédente évaluation en Histoire où les élèves devaient cette fois-là décrire la cité d’UR au III° millénaire avant J.-C.
Le lien créé m’a permis de fixer de nouveau quelques points indispensables à la réalisation de cette compétence Décrire. Une compétence  qui n’est pas acquise par la très grande majorité des élèves (et cela très normalement au premier trimestre de la classe de 6ème ). Cependant,  une large partie de cette « grande majorité » a pu prendre conscience lors de cette remédiation des attendus d’une compétence qui sera réactivée à de nombreuses reprises lors de leur scolarité au collège.
Cette remédiation jumelée entre Géographie et Histoire m’a permis également d’insister sur l’absolue nécessité d’avoir des connaissances précises pour réaliser les exigences des compétences évaluées. Les élèves ont pu percevoir que si la démarche est similaire dans les deux évaluations comparées, le contenu lui nécessite une différenciation appuyée sur des connaissances précises à chaque description.
Et au professeur de remettre à l’esprit de ses élèves l’indissociabilité des connaissances et des compétences pour l’accomplissement d’une formation complète.
Je vais conclure ce premier retour d’expérience par une constatation qui a suscité chez moi un étonnement  porteur de perspectives pour la suite de la réalisation ce projet pédagogique innovant mené au collège Lou Vignares.
J’ai ainsi observé chez la classe pour laquelle j’ai mis en parallèle la double évaluation (note et compétences), que certains élèves pouvaient avoir jusqu’à 13 ou 14 /20 (donc avec souvent une perception de « bonne note) et avoir les ¾ des compétences non validées.
En parallèle, un élève de la classe évaluée uniquement par compétence s’est retrouvé avec 100% des compétences non validées alors qu’il aurait eu un  10 ou 11/20. Evalué par note, cet élève aurait été satisfait d’avoir « la moyenne ».
Cette observation factuelle m’a amené à prendre conscience que l’évaluation par compétences est plus exigeante pour nos élèves.  Elle doit donc être plus formatrice sur le long terme, mais pour que les fruits portent et ne laissent pas la place au découragement, je suis convaincu de la nécessité d’une valorisation bienveillante à la hauteur du niveau d’exigence  affiché.

Raphael Marre, bientôt sur les cercles, à l'écoute de vos rebonds.