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Echapperons-nous un jour à la malédiction de Sisyphe ?

Jean-Michel Zakhartchouk

Depuis la Libération, que de tentatives d’introduire des dispositifs dans le secondaire pour amener un peu de croisement de disciplines, un peu de collaboration entre disciplines.
Citons quelques-uns de ces dispositifs qui ont disparu sans vraiment qu’un bilan ait été fait, avec parfois un éloge de leurs effets positifs…accompagnant leur enterrement ou leur réduction à trop peu de choses.

L’étude du milieu

Introduit dans les classes nouvelles en 1945, on a essayé de l’étendre à un horaire obligatoire en sixième-cinquième. Il s’agissait d’étudier un ensemble naturel ou humain faisant partie du cadre de vie de l’enfant. Il ne devait surtout pas y avoir de « professeur d’étude du milieu » ! L’objectif était de décloisonner les disciplines à travers des enquêtes et une coopération entre matières.

Les dix pour cent

Les dix pour cent sont institués par une circulaire de mars 1973. Pendant un dixième du temps scolaire peuvent être organisées des activités scolaires différentes (avec regroupements possibles sous forme de demi-journées ou journées). Parmi les possibilités, le décloisonnement des disciplines autour d’un thème, l’utilisation de méthodes actives, l’ouverture de l’école sur l’extérieur.

Les PAE (projets d’action éducative)

Les Projets d’action éducatives ont été institués en septembre 1981, à la suite des PACTE mis en place quelques années auparavant. Le but était à la fois de lutter contre l’échec scolaire et de libérer les initiatives des enseignants. Ils étaient censés « pouvoir bénéficier au moins du temps et des facilités précédemment accordés par l’établissement pour la mise en œuvre du 10 % ou des PACTE ». Trois types de PAE pouvaient se mettre en place. Ceux de type 1 avaient pour objectif « d’enrichir le travail de la classe ».

Les thèmes transversaux

Les thèmes transversaux sont l’ l’innovation des programmes de 1985, qui, très axés sur le retour au « disciplinaire », introduisaient par là une « respiration » nécessaire. Contrairement aux PAE, cette innovation, dans une période de désenchantement relatif des « pédagogues » après le départ de Alain Savary du Ministère, est souvent restée lettre morte et n’a eu qu’un succès d’estime.

 

Les parcours diversifiés

Expérimentés en 95-96 dans le mouvement de la rénovation du collège entreprise en 95, les parcours diversifiés prévus pour les cinquième étaient destinés au début à se généraliser et à s’étendre à la 4e, mais ils n’ont jamais été rendus obligatoires. En 96, ils sont présentés comme une possibilité offerte aux établissements, dans le cadre de la souplesse horaire mise en place au cycle central, de distraire quelques heures à l’horaire global des élèves de cinquième pour pratiquer — en regroupant les élèves par ateliers, ou même en gardant les classes — une « pédagogie du détour

Cinq ans après, les parcours diversifiés, toujours fondés sur « les capacités d’initiative des établissements » sont demeurés un champ d’innovation, ont suscité maints échanges sur le Net en particulier… mais sont restés le fait d’une minorité de collèges.

 

Les travaux croisés

Leur histoire est proche de celle des parcours. Annoncés dans un BOEN de juin 1999, ils auraient dû être, l’année suivante, obligatoires pour toutes les classes de 4e et même être évalués pour le Brevet des collèges. Un an plus tard, le BOEN de juin 2000 réaffirme leurs objectifs mais se replie sur un simple encouragement à les mettre en place, reportant à plus tard la prise en compte de leur évaluation pour le Brevet.

Le principe des travaux croisés est plus précis que celui des parcours : ils doivent porter obligatoirement sur des points du programme de 4e, impliquer plusieurs disciplines et aboutir à une production personnelle, individuelle ou dans le cadre d’un groupe. On reconnaît l’esprit des Travaux Personnels Encadrés qui dans le même temps se mettent en place dans les lycées

Les TPE

Ils se mettent en place suite à la grande consultation lycéenne de 1998 et concernent au départ les classes de première et terminale. Ils visent également à développer chez les élèves les capacités d'autonomie et d'initiative dans la recherche et l'exploitation de documents, en vue de la réalisation d'une production qui fait l'objet d'une synthèse écrite et orale. En supprimant les TPE en Terminale, le ministre Fillion en 2003 leur fait beaucoup perdre de leur élan et de leur importance.

Parallèlement se mettent en place les Projets personnels à caractère professionnel en LP et des heures détachées des disciplines comme l’éducation civique, juridique et sociale.

 

Les itinéraires de découverte

Ils sont mis en place en 2002 par Jack Lang. La spécificité des itinéraires de découverte tient dans leur définition comme un temps d'enseignement obligatoire qui vise à une meilleure appropriation des programmes en favorisant une implication plus grande des élèves grâce aux choix qui leur sont proposés, et au développement de stratégies pédagogiques plus efficaces comme l'apprentissage de l'autonomie. Ils s'appuient sur des contenus d'enseignement clairement ancrés sur les programmes du cycle central, lesquels s'inscrivent dans quatre grands domaines thématiques qui permettent d'organiser la démarche interdisciplinaire.

Ils seront quasiment abandonnés dans un texte qui célèbre par ailleurs leur réussite !

 

Ces dispositifs ont fait l'objet de plusieurs dossiers des Cahiers Pédagogiques, dont certains sont aujourd'hui épuisés.

Mais cet historique de Jean-Michel Zakhartchouk est un condensé d'une historique plus complet publié dans l'ouvrage « Croisements de disciplines au collège », Florence Castincaud et Jean-Michel Zakhartchouk, Repères pour agir, cndp, Crap-cahiers pédagogiques, 2002