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Avec Clisthène Un atelier de sciences et de maths pour écoliers et collégiens

Jeudi – 14 h – Collège du Grand parc à Bordeaux. L’école a rendez-vous avec le collège. 24 écoliers de CM1-CM2 de l’école Condorcet stationnent sagement, poche plastique en main remplie de feuilles, stylos, compas, règle, devant la maison des personnels de Clisthène, sous l’œil protecteur de Mélanie Dupuch, leur maîtresse.  Mais aussi sous l’œil amusé – parfois attendri - des grands de 3ème du collège, affalés sur les tables extérieures. Ils attendent les élèves de 6ème qui finissent par débouler du fond de la cour. Branle bas de combat pour  deux heures de travail intense avec les écoliers ! Enfin, descend des escaliers métalliques Pierre-Jean Marty, le professeur de sciences – et accessoirement directeur du collège expérimental Clisthène – en retard (un peu) de ses préparations de salles et content (très) d’accueillir pour la troisième semaine l’école primaire au sein du collège. Pas pour une visite guidée, mais bien pour travailler – du pur et du dur apprentissage bien disciplinaire : réalisation et schématisation de circuits électriques et constructions géométriques au menu de cet atelier. Et le pire, c’est que tout le monde semble content dans l’histoire !

Le rituel est déjà bien rôdé, chacun se met au travail immédiatement. Les deux heures passées au collège sont mises à profit par tous. Les pratiques de classe se sont imbriquées d’elles-mêmes. Après de courtes présentations, familiers du travail en ateliers, les CM comme les 6èmes, ont formé de petits groupes. L’entraide est de mise, jamais imposée. Fini la petite appréhension de l’écolier de CM2 qui découvre le collège, fini la démultiplication des disciplines (3 en 1) et des professeurs (3 en 1). Ce dispositif s’inscrit pleinement dans la philosophie de la Main à la pâte – expérimenter avec du matériel qui marche et en abondance – et qui se prolongera au collège par l’Enseignement Intégré des Sciences et Technologie – l’EIST - faisant déjà partie « des meubles » après deux ans d’existence. Côté maths, avec la professeure des écoles, les élèves revoient les bases du vocabulaire géométrique. Les collégiens réinvestissent leurs connaissances dans le domaine, permettant aux écoliers (qui n’en perdent pas une miette) d’en acquérir de nouvelles. Une fois le travail achevé, les groupes confrontent leurs résultats, ce qui donne lieu à de savoureux échanges de pratique. Après une rapide mise en commun, une synthèse orale par deux ou trois élèves vient clore chaque séance, nous en profitons pour annoncer le programme de la semaine suivante. C’est déjà l’heure de se quitter.

Un pont vers le collège 

Très vite, ce petit atelier mêlant sciences et mathématiques – électricité et géométrie – mélangeant écoliers et collégiens, a dépassé nos espérances. On est passé rapidement de la traditionnelle familiarisation avec l’univers du collège à l’apprentissage. En reliant nos programmes, nous avons construit des passerelles. De véritables outils pédagogiques au service de l’autonomie et de l’épanouissement des élèves. L’efficacité de ce dispositif réside dans sa grande simplicité : accueillir les élèves au centre des apprentissages. Cinq semaines, dix heures de travail et des élèves déjà capables de schématiser le circuit électrique complet du système d’éclairage de la salle de classe où ils se trouvent. Et qui ressortent renforcés en mathématiques. Tous ça dans l’enthousiasme et avec un appétit de comprendre que l’on a peu souvent l’occasion de rencontrer.

Objectifs atteints ?

On est habitué à rencontrer des difficultés de mise en musique, de faire des réglages de dernière minute… Ici, les ajustements effectués n’ont fait que donner plus d’intérêt et de force à l’atelier. Ainsi, la semaine où les CM2 ne peuvent pas venir, on en profite pour deux heures de TP intensifs qui permettront aux trinômes CM2/6ème d’être encore plus performants, les collégiens transformant en professeurs de sciences particuliers. On se perfectionne aussi en enseignant soi-même, on prend ses responsabilités sous l’œil bienveillant du professeur qui ajustera le tir si nécessaire. La collaboration entre pairs était nécessaire à la résolution des différentes situations problème. Chacun a trouvé comment apporter de l’eau au moulin, naturellement, en s’appuyant sur ses propres connaissances. La barrière est tombée entre CM2 et 6èmes. On s’écoute, on élabore des stratégies qui font avancer le groupe en tenant compte de chaque point de vue.

Vers une approche par pôles disciplinaires

Poussons le bouchon plus loin. L’effet combiné, ou plutôt la continuité entre l’atelier CM2-6ème/sciences-maths et l’EIST permet d’envisager une anticipation de la programmation de l’électricité au collège[1], traditionnellement abordées en 5ème. Ainsi, s’amorce un décalage : le programme de 5ème en 6ème, celui de 4ème en 5ème etc. Le temps prévu initialement  en 3ème à l’électricité peut être utilisé à s’assurer une meilleure maîtrise des élèves grâce à des temps de retour en arrière sur des difficultés ou des extensions pour les plus à l’aise ou les plus autonomes. Bref, une vision modulaire sur l’ensemble du temps école/collège : un pudding d’électricité avec des morceaux de remédiation dedans !

Actuellement, nous échangeons (en attendant l’arrivée du conseil école/collège) avec nos camarades des écoles du secteur pour étendre ce type de « liaisons » à des regroupements disciplinaires autres que le pôle scientifique : l’EPS est dans les starting blocks, sans oublier les langues vivantes, histoire d’assurer une meilleure continuité avec l’enseignement bilangue anglais/espagnol déjà existant dès la 6ème. Autant de pistes à creuser…

Et après ? Le lycée ! Rien n’empêche de travailler avec les lycées de secteur dans cette direction. L’accompagnement personnalisé est un espace prédisposé pouvant permettre cette fois à nos collégiens de 3ème de se frotter aux exigences du lycée en termes de savoirs-faire, d’organisation du travail personnel. Au menu : puissance de dix, vocabulaire de courbes graphiques et utilisation de  calculatrices scientifiques… Miam ! Miam !

Mélanie Dupuch, Michel Fortin (professeurs en CM2 à l’école Condorcet, Pierre-Jean Marty (professeur de sciences à Clisthène)

Fiche d’identité de l’atelier

Public concerné : les deux classes de CM2 d’une école de secteur et la classe de 6ème de Clisthène – les professeurs des écoles et un professeur de sciences

Durée : un trimestre découpé en deux périodes égales de 5 à 6 semaines : une classe de CM2 et une demi-classe de 6ème : Chaque élève fait 5 à 6 heures de sciences et 5 à 6 heures de remédiation e n mathématiques.

Contenu d’enseignement : électricité (programme de CM1 et le début de celui de 5ème) – mathématiques (programme adapté aux chapitres traités à ce moment de l’année)

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Le point de vue des zinstits 

Chaque année, nous sommes les premiers témoins de l’anxiété que suscite l’entrée au collège. Pour nous, ce dispositif, c’est un moyen d’accompagner nos élèves vers plus d’autonomie. Il est à noter que le déroulement de ces séances sur deux heures, participe de la familiarisation des CM au fonctionnement horaire du secondaire. Les réinvestissements sont réels (techniques de tracés, mesures…), ils prennent  conscience de la notion de permanence (vocabulaire géométrique, propriétés, symboles…) En tant qu’enseignants, nous avons reformulé, étayé, mais nous avons surtout pu… observer. Nous avons été surpris, en particulier par la richesse des interactions entre élèves. Chacun d’entre eux s’est exprimé, a pu démontrer, se tromper sous le regard bienveillant des autres. Ils sont allés au collège, ont été accueillis, aidés, entourés, encouragés, écoutés et intégrés. Il ne leur tarde qu’une chose : y retourner pour y (re)mettre la main à la pâte !




[1] Après avoir été amorcé à l’école primaire, contrairement à ceux de SVT et de Technologie, l’enseignement des sciences physiques n’existe plus en 6ème, pour réapparaitre en 5ème.